A l’heure où le Père Neau (97 ans) vient de mourir (sans doute noyé dans son pastis passé), je veux vous parler nécro. Pas nécrosé (Geneviève Rouyer l’était t’elle à 80 ans ?… nécessairement bien mouillée) mais pas noyée, elle ; j’ai le nez creux. Lire dans “La Mort des Pauvres” (in “Les Fleurs du mal” -1857-) de Charles Baudelaire : “C’est la Mort qui console, hélas ! Et qui fait vivre ; C’est le but de la vie, et c’est le seul espoir, Qui, comme un élixir, nous monte et nous enivre, Et nous donne le cœur de marcher jusqu’au soir…” n’est pas néfaste à notre santé mentale.
Au contraire, puisqu’on va tous passer par là, autant dire que c’est une “mort sûre.” Alors parlons-en ! (ça ne nous fera pas mourir pour autant) Et puis “C’est la conscience de la mort qui transforme la vie en élan” dit si bien François Cheng. On a donc, avant de mourir, une vie à vivre ! Alors, prêts à vivre en mortel ? Sans habiter une nécropole, “ne nous prenons pas au sérieux, personne n’en survivra” disait Alphonse Allais.
Même Florence Nourisson y est passé récemment, à l’âge adulte cependant, c’est dire. Saint-Nectaire priez pour nous (se désespère la laitière) !
La religion du consumérisme a besoin de personnes frustrées et pressées, vous savez. Elles vivent souvent dans l’hyperactivité, sans patience ni recul. “Je cours pour oublier que la vie est trop courte” écrit joliment Annie Dreslère. J’ai donc les fesses dans le bon gui mais aussi la tête dans le guidon.
Houx as-tu la tête (demande le hiboux) ? Redresse-toi donc (c’est un don) et regarde le ciel : “En observant les cieux, nous y trouverons les lueurs qui nous guideront vers notre avenir” a dit Hiroshi Sugimoto (qui n’est pas motard, d’après mes sources, mais qui sait ? -c’est un photographe japonais contemporain-).
Thérèse d’Avila (qui ne roulait pas en Kawasaki) aurait déclamé : “Ô mort, je ne sais pas comment on peut te redouter, puisque c’est en toi qu’est la vie !”
Bref, la vie ne serait pas la vie sans la mort, et l’occulter de son existence ne nous fera pas réaliser une meilleure vie, bien au contraire.
Laissons ainsi le mot de la fin à Emmanuel Nécro Godo : “Parlez-leur de la mort. Du lent travail d’une vie pour en habiter la pensée. Parlez-leur de la longue patience, du combat, de la peur, de l’espérance, des éboulis sous les pas. Des visages qu’on aimerait bien retrouver là-haut, de la table qui nous y attend. De cette lumière qu’on entrevoit certains jours…” JMP (© 2024)
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