Chronique Terrienne n° 257  La colère, notre affaire. Oui la colère est bien l’affaire de chacun(e). Cette émotion, parmi les plus fréquentes dans nos vies (avec la joie, la peur, la tristesse, la honte et le dégoût pour ne citer que les principales) est un sacré défi pour beaucoup, tant la réguler est délicat.
Bienvenue la colère” disait une de mes formatrices CNV*, car la colère c’est aussi de l’énergie ; et contrairement à la tristesse qui souvent nous “ramollit”, la colère nous met généralement en action. “C’est en tout cas le signal que j’ai un besoin impérieux à nourrir”.

Rester en colère, c’est comme saisir un charbon ardent avec l’intention de le jeter sur quelqu’un : c’est vous qui vous brûlez” aurait dit Bouddha. En effet la colère durable peut être destructrice : contre soi bien entendu ; contre l’autre bien sûr. Alors comment tenter de gérer la colère qui nous prend tous, selon notre caractère, plus ou moins souvent ? Ma réponse : en se dotant de compétences relationnelles !

Parce qu’au-delà de reconnaître le plus tôt possible sa colère, savoir verbaliser, c’est à dire exprimer sa colère par les mots qui conviennent, est pertinent ; c’est la première des clefs. Car l’autre clef est d’oser. Et nous n’osons pas (généralement) si nous n’avons pas le vocabulaire. Ce qui revient à se frustrer, en gardant, emmagasiner en nous, cette énergie qui finira par nous enflammer dans les heures ou les jours qui suivent. Ou bien alors on lâche les chevaux, “on pète un câble”, et le verbal est toujours désastreux car violent. Hors de contrôle, nos mots et nos gestes vont souvent bien au-delà de notre volonté et de notre pensée. Difficile sera le lendemain dans la relation avec cette personne qui se sentira heurtée, blessée, non-respectée, aura peut-être eu peur ; sera elle-aussi finalement peut-être tombée à son tour dans la violence d’une colère “boomerang”.

Sachez exprimer fermement, mais sans violence, votre colère. “Ce que j’entends de votre bouche aujourd’hui me met en colère” a le mérite d’être clair et va déjà vous soulager ; ou alors “là, la moutarde me monte au nez cher Monsieur” est une expression que j’ai fait mienne, pour faire comprendre clairement à l’autre que ma “coupe est pleine”. Mais comme toute émotion me parle de mon besoin, quel est-il ? Besoin de compréhension, de respect, d’attention, de sécurité etc… Faire une demande explicite à l’autre en verbalisant ce besoin est la troisième clef. Mon besoin est vital pour moi, je dois le nourrir. Mais comprenons qu’il n’a pas forcément “besoin” d’être assouvi (qui plus est immédiatement) mais toujours d’être “entendu”, par contre.

Si je me résume : acquérir la fluidité dans l’expression précise de nos émotions (oser dire les choses de notre météo intérieure à l’autre) va me donner confiance et j’aurai ainsi plus de compétences pour gérer ma colère (émotion dont il s’agit ici dans ce propos).

La colère est maturante, elle nous permet de découvrir qui on est au travers de nos blessures, de nos injustices et de nos humiliations” dit le psychologue Jean Van Hemelrijck. Jacques Salomé, psychosociologue et écrivain, explique que “la colère est le langage d’un retentissement, d’une résonance en nous, il ne faut pas la cacher, mais il ne faut pas la jeter sur l’autre. La colère est un langage, celui de la frustration, du sentiment d’impuissance etc… touché dans ma zone d’intolérance, la partie de mon égo disqualifié précédemment par des comportements inadéquat d’autrui est réactivée. J’ai le droit d’être en colère, devant l’autre, pas sur l’autre !

Je donne personnellement à mes clients (en coaching d’assertivité ou dans mes formations en communication consciente et bienveillante) des listes de vocabulaire** Savez-vous qu’il existe en français plus de 150 mots pour exprimer ses sentiments ? Faut-il les avoir au bout de la langue ; ou plutôt bien en bouche ! Pour conclure cette chronique colérique, voici une belle définition de la rage : “colère qu’il vaut mieux extérioriser si l’on ne veut pas souffrir de rage dedans.” 😉 JMP

* La CNV (Communication Non-violente), créée par Marshall Rosenberg, nous invite à sortir du système binaire et de l’opposition, au-delà du “qui a tort, qui a raison”, et à prendre soin les uns des autres, sans renier l’endroit où nous sommes.

** Plus de colère, moins de vocabulaire : quand la musique reflète la société. Entre 1980 et 2020, les paroles de nos chansons sont devenues de plus en plus répétitives en transmettant de plus en plus d’émotions négatives.

RESSOURCES :

– Demandez-moi le “Sentimètre” (création Jean-Luc SOST – CNV) et d’autres listes de besoins humains (pour vous les “mettre en bouche”) !

– Un extrait de “La colère” de Gaétan Roussel (Album “Est-ce que tu sais ?” 2021)

Chaque jour il faut s’y faire
Elle revient toujours la colère
Chaque jour elle nous effleure
Je crois qu’elle vient de l’intérieur
Chaque jour sur un bout de terre
Elle revient toujours la colère
Chaque jour elle nous effleure
Je crois qu’elle vient de la douleur
Chaque jour depuis des millénaires
Elle revient toujours la colère
A croire qu’elles sont plusieurs
A nous grignoter le cœur

– La colère par THOMAS d’ASEMBOURG (CNV) en vidéo ici

Catégories :