Chronique Terrienne n° 213  La durée de passation, c’est à dire le temps où le cédant est toujours au côté du repreneur après le rachat effectif, dans le cas d’une transmission d’une PME, est une question délicate. 

Délicate, car en effet la durée idéale dépend de nombreux facteurs, comme la complexité de l’écosystème de l’entreprise ou encore le caractère et les attentes de chacun des deux protagonistes. Cette période de “doublon” du leadership est également difficile à appréhender car elle concerne évidemment bien plus d’interlocuteurs que les deux individus en question.

Un véritable “tandem” à opérer…

Si l’on parle uniquement de la période de briefing opérationnel et de présentation de la part de cédant au repreneur des partenaires et notamment de certains clients, on distinguera le départ progressif d’un cédant nécessité par la sécurisation du portefeuille clients dans un secteur très concurrentiel (en BtB par ex. et lorsque l’interaction avec des grands comptes voire des donneurs d’ordres est forte, cette étape est stratégique), d’une activité à la clientèle plus atomisée, peut-être moins volatile (activités dans le consommable ou le service récurrent par exemple…)

Je focaliserai mon propos dans ce post sur la dimension “personnalité”. Parce qu’il est non seulement souvent le fondateur de l’entreprise mais aussi régulièrement “l’homme clef technique”, le cédant doit apporter un soutien conséquent au repreneur dans la logique de le légitimer.

Le passage de relais doit être un point bien clairement négocié dans le cadre de la reprise, car il n’est pas anodin.

En résumé, il ne s’agit ni de se précipiter, ni de maintenir le flou que génère les 2 personnalités au même “poste”. Avoir une date officielle à communiquer aux salariés et aux parties prenantes est une façon pertinente de clarifier le transfert de pouvoir. Ce dernier doit intervenir rapidement après la signature (et sa dimension juridique) mais la prise de leadership effective aura besoin de quelques semaines pour s’installer *. En revanche et d’une manière générale, considérons que dans ce domaine on a souvent envisagé un laps de temps trop long. Les deux entrepreneurs n’ayant pas le même caractère (sic), mais également plus les même objectifs, la cohabitation ne simplifie donc pas l’activité de l’organisation mais l’alourdit. Le repreneur doit pouvoir ainsi, selon moi, stopper le tandem avant le terme prévu initialement, s’il le juge nécessaire.

Les dimensions commerciales et salariales ayant souvent été anticipées dès les premières discussions, tout comme avec certains partenaires si besoin (banquiers, gros clients, fournisseurs clefs…) les parties doivent apprécier rapidement si un timing de 1 mois est suffisant ou alors s’il y a des missions à accomplir en duo pour que le repreneur se sente à l’aise ensuite. Auquel cas, un passage de témoin de 3 mois peut s’entendre.

Un véritable “deuil” à faire…

Que le cédant reste dans l’entreprise ensuite à temps partiel pour intervenir sur un dossier spécifique qui a encore besoin de son savoir-faire technique n’est pas forcément une mauvaise idée en soi, mais son comportement doit être alors aligné avec le transfert du pouvoir décisionnaire.

L’option d’un ” learn-out”, c’est à dire un complément de prix à verser par l’acquéreur en fonction d’objectifs financiers à atteindre (chiffre d’affaires, résultat net ou tout autre indicateur) est utilisé de plus en plus fréquemment dans le cadre des ventes d’entreprise. Il a pour but de conduire le cédant à s’impliquer fortement dans la marche de la société une fois la cession réalisée. Si l’objectif est louable, ces situations se révèlent parfois complexes à gérer. Une nouvelle attitude est à adopter par le cédant ; pas si simple pour un entrepreneur à qui il est demandé de devenir “simple salarié”, alors qu’il a un lien souvent très affectif avec son ancienne entreprise.

Il saura d’ailleurs se faire accompagner, à titre individuel, pour être en conscience de l’engagement qu’il prend vis-à-vis de son successeur, mais également dans sa psychodynamique personnelle, de manière à progressivement “lâcher-prise” et construire son propre futur de manière concrète (même si la retraite peut sonner) ! JMP

* L’occupation de la salle de réunion par le repreneur avant de passer ensuite (quelques temps plus tard) dans le bureau Directorial, sera de nature à matérialiser aux salariés “le passage des commandes” de l’entreprise.

AE PME

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